L’Organisation Internationale du Travail créée en 1919, à la fin de la guerre mondiale, avait comme intention d’incarner la face humaine du capitalisme, en réponse directe à la révolution bolchévique. Elle réunit 4 000 délégués en provenance de 187 pays membres. Organisation tripartite (représentants d’employeurs, de syndicats et de gouvernements), elle est une concertation permanente au niveau mondial. C’est en 1923 qu’ont été créées les premières normes statistiques dans le domaine du travail.
La 106e session annuelle de l’OIT, parlement mondial du travail, s’est tenue à son siège de Genève du 10 au 20 octobre 2023.
Les conférences annuelles de l’OIT n’aboutissent à aucune décision fracassante, pas plus que n’est attendue la présence de nombreux chefs d’états. Cette année, le directeur de l’OIT, ancien syndicaliste britannique, a présenté un rapport sur le travail et le changement climatique. Tous les sujets d’actualité sont évoqués : migrations de main d’œuvre, emploi et travail au service de la paix et de la résilience (pays ayant connu guerre et/ou catastrophes naturelles), participation difficile des femmes au monde du travail, justice sociale pour une mondialisation équitable… Aucun sujet n’est occulté.
L’OIT n’a pas de pouvoir de sanction mais elle peut dénoncer le fait que des conventions n’ont pas été suivies d’effets par des gouvernements qui les avaient pourtant adoptées C’est ainsi qu’en 2011, la France a été épinglée sur le travail du dimanche, suite à une saisine d’une organisation syndicale. L’OIT estimait que la hausse des dérogations dans l’hexagone obéissait à des préoccupations économiques sans prendre en compte l’impact social des salariés. C’est regrettable pour la France mais cela n’a eu aucun effet.
Ce manque de pouvoir de l’OIT ne signifie pas, pour autant, impuissance. C’est par le biais des recommandations de l’OIT sur le travail forcé que la plupart des entreprises ont accepté de boycotter la Birmanie, ce qui a eu un effet sur le long terme. L’OIT agit directement dans de nombreux pays pour améliorer les conditions de travail des salariés. Au Bangladesh, par exemple, elle a aidé à créer un corps d’inspecteurs pour contrôler les usines après le drame du Rana Plaza (24/04/2013 avec plus de 1 100 morts) qui a révélé des formes extrêmes de production. Il s’agit de réalisations concrètes et discrètes qui ne changent pas la donne.
En un siècle, depuis la création de l’OIT, on ne peut pas dire que les droits des travailleurs n’ont pas évolué globalement vers un mieux mais ce processus est menacé. L’OIT se demande aujourd’hui comment elle peut évoluer, à l’heure où se développent de nouvelles formes de travail qui aiguisent encore plus l’asymétrie de pouvoir entre employeurs et salariés. Cette asymétrie favorise les extrémismes.
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